Films du patrimoine : « Délivrance », une randonnée mortelle
Quatre Américains, Ed Gentry, Lewis Medlock, Bobby Trippe et Drew Ballinger décident de consacrer leur week-end à la descente en canoë d’une impétueuse rivière située au nord de la Géorgie. Ils envisagent cette expédition comme un dernier hommage à une nature sauvage et condamnée par la construction d’un futur barrage, mais les dangers qu’ils affronteront ne proviendront pas uniquement des flots tumultueux de la rivière…Il est humain. Le petit groupe va vite se retrouver face à la cruauté des gens du cru, et devoir lutter pour survivre.
Ce film de John Boorman sorti en 1972, est adapté d’un roman de James Dickey. Il évoque l’affrontement de deux mondes d’un même pays : Les gens de la ville d’un côté, et les laissés pour compte d’une Amérique profonde de l’autre, dans une admirable nature sauvage.
Le chef d’œuvre de John Boorman qui va imposer une violence à un paroxysme rarement atteint avant lui. Cette extraordinaire descente en rivière, va se transformer en véritable cauchemar pour les citadins John Voight, Burt Reynolds, Ned Beatty et Ronny Cox. Le retour à la nature se transforme en retour à la sauvagerie. Un film terrible, chargé d’une tension permanente, physique et morale, qui est à la fois captivante, fascinante et éprouvante.
Le mythe de la nature idyllique, accueillante, où l’on peut se ressourcer, est bien mis à mal. Impossible d’évoquer Délivrance sans mentionner la scène dont tous ceux qui ont vu le film se souviennent, il s’agit du viol homosexuel commis par un homme des bois contre Bobby. Une scène qui éparpille façon puzzle, le mythe de la nature idyllique. Jusqu’à ce film, le cinéma ne montrait que des agressions sexuelles dirigées contre des femmes. Sans oublier la scène culte d’un duo hallucinant et peu ordinaire entre une Guitare et un Banjo.
Sans star à l’horizon et avec une histoire flirtant plus qu’allègrement avec la violence, Délivrance n’a évidemment pas bénéficié d’un énorme budget, deux millions de dollars.
Si le film n’est surement pas le premier Survival de l’histoire du cinéma, il est certainement celui qui a le plus marqué les spectateurs, au point de donner naissance à de multiples déclinaisons plus ou moins inspirées. Le film fut une sacrée bonne affaire, et rapportera au final plus de 46 millions de dollars. Propulsant ainsi, Boorman au firmament des cinéastes à suivre et qui a contribué à mettre en orbite les carrières de ses quatre vedettes masculines. En France, ils furent près d’un million à venir éprouver des sensations fortes et inédites, propulsant ainsi le film au rang d’œuvre culte.
« J’ai fait beaucoup de films. Peut-être soixante ou soixante-dix. Il n’y a pas trace de cinquante d’entre eux dans ce musée. Dix d’entre eux sont Ok, même assez bons. Mais toute une partie d’une salle est dédiée à Délivrance car ce film a changé ma vie ». Confiait alors Burt Reynolds lors de la réunion organisée dans le musée Burt Reynolds en Floride en compagnie des trois autres acteurs principaux du film, John Voight, Ned Beatty et Ronny Cox, à l’occasion du 40ème anniversaire du film.