Film du Patrimoine : « Le festin de Babette »
« Le Festin de Babette » est une comédie dramatique de Gabriel Axel inspirée d’une nouvelle de Karen Blixen. Les acteurs principaux de ce film sorti en 1987 sont Stéphane Audran, Bodil Kjer, Brigitte Federspiel.
En 1871, la tempête fait rage. Dans le village dont leur père était pasteur, Martine et Filippa, deux sœurs, vieilles filles, s’apprêtent à passer une soirée aussi tranquille que de coutume, mais on frappe à la porte. La tempête a porté une Française sur le rivage, Babette (Stéphane Audran) qui fuit la répression, vient se réfugier sur la côte sauvage du Jutland, au Nord du Danemark, elle devient la cuisinière des deux sœurs. Chef du célèbre Café Anglais, elle a perdu sa famille sous la commune. C’est un habitué du Café, passant jadis sur ce rivage le temps de s’éprendre de Filippa et d’être éconduit, qui lui a conseillé ce refuge.
Tous les ans, elle prend un billet de loterie. La quinzième année, elle gagne, et décide d’utiliser l’argent pour préparer à ses bienfaitrices et à leurs voisins, un festin digne de ceux que le Café Anglais servait aux plus élégants Parisiens…
Gabriel Axel, un Danois élevé à Paris, a réalisé de nombreux films pour le cinéma et la télévision au Danemark, et quelques-uns en France. Il s’est battu pendant 14 ans pour porter ce récit à l’écran et motiver les producteurs, peu convaincus par une histoire semblant manquer de rebondissements et centrée sur des vieilles filles chantant des cantiques. Avec Le Festin de Babette, grand succès public couronné par un Oscar, le réalisateur accède à une renommée internationale. Le réalisateur esquive le portrait à charge d’une société archaïque pour n’en retenir que des archétypes tous droits sortis d’un conte pour enfants. Avec humanité, la caméra est caressante sans être impudique et laisse imaginer ce que chaque personnage a pu laisser derrière lui. Du passé de chacun, nous ne savons finalement rien, si ce n’est ces quelques flash-backs joliment démodés qui viennent expliquer l’isolement progressif de ces deux vieilles sœurs à qui la vie avait pourtant décidé de sourire.
Axel a conçu un chef-d’œuvre de finesse, qui confronte avec délice les nourritures terrestres et les nourritures spirituelles. Le style, minimaliste, laisse émerger des émotions profondes. Une humanité douce, chaleureuse, jaillit de la grisaille quotidienne grâce aux plaisirs gustatifs. Ce film, à la fois intelligent et sensible, peut être perçu comme un hymne aux petits plaisirs de la vie, une réflexion sur le bonheur (éphémère), sur l’art et sa réception, ou encore sur la foi.
Oscar 1988 du meilleur film étranger, Le Festin de Babette, bénéficie du talent de Stéphane Audran (remarquée par Gabriel Alex dans Violette Nozière de Claude Chabrol). Cette dernière, quelque peu lassée des rôles de femme fatale et de bourgeoise délaissée, a mis beaucoup de sa personne dans Babette, et sa prestation est remarquable de sobriété et de justesse.
Suite aux récompenses obtenues, la tournée promotionnelle donnera lieu à plusieurs diners semblables à celui du film, (à l’exception de la soupe de tortue).
Gabriel Alex sera promu Officier de la Légion d’Honneur pour sa promotion de la gastronomie Française.
En conclusion, Le Festin de Babette, constitue donc une médiation entre l’espace nordique et la France. La consécration par un Oscar a étendu la portée de ce film au reste du monde. La pertinence de cette médiation est due à deux facteurs : à la nature de l’objet- médiation d’une part, puisque le cinéma se présente comme passeur de culture privilégié, et au sujet de l’œuvre d’autre part. En effet, la gastronomie est un thème universel et fédérateur. L’art de vie à la Française, aujourd’hui classé au patrimoine immatériel de l’humanité, continue, ne serait-ce que lors de négociations politiques, à créer un lien social fort.
Un film à consommer sans modération…